EXCLUSIVO
DESDE MÉXICO / SAÚL IBARGOYEN
L’ENFANT AU PRÉNOM INCONNU
AUJOURD'HUI, JE VEUX TE PARLER d'un
enfant, un peu différent des autres. Parce qu'il n'avait pas de prénom ,ou
plutôt, son prénom était caché,
dissimulé dans un lieu parmi beaucoup d'autres du monde, où il vivait.
Ceci est peut-être drôle pour toi, car ton nom Bien à toi t'accompagne
toujours: Pierre, Marie, Roxane, Antoine, Ambroise ou Judith.
Comment faisaient les gens pour
l'appeler? Par d'étranges mouvements de mains et de bras, ou en lui parlant avec
des sons compliqués
qui ne ressemblaient à aucun prénom dont on puisse se souvenir.
L'enfant vivait loin de toute village
et très loin de toute ville.
Sa maison se dressait sur des planches en bois, de pierres, de
briques de pisé à côté d'un vieux chemin ridé
par un
vent de poussière.
Auparavant, la maison était installée
au milieu de l'un de ces champs
immenses, sans limite ni dimension d'où le propriétaire (un puissant
propriétaire terrien) l'avait chassé pour que l'innombrable troupeau de vaches puisse engraisser
tranquillement en broutant et broutant l'herbe du pâturage. C'est ainsi que sa maison
avec ses pierres, ses briques
et ses planches de bois (une sorte de bagage léger) a été installée comme elle a pu près du chemin. J'ai
dit "sa maison", mais ce n'était pas la sienne. Elle appartenait à des
paysans, des amis besogneux et âgés qui s'occupaient de l'enfant, presque depuis sa naissance.
Sa mère était partie à la ville
(Comment était cette ville?). Elle y était partie tout simplement pour
travailler, car: que pouvait-elle faire avec ses deux et uniques mains dans cette campagne si
abandonnée et poussiéreuse? C'est pourquoi l'enfant n'avait pas de prénom parce que ses bons amis, travailleurs de la terre et de la pluie, espéraient
qu'elle reviendrait pour leur dire ou dévoiler ce prénom inconnu (le mot qui a donné le titre à ce conte).
-Ta mère a encore beaucoup de travail
à la ville. Elle viendra bientôt te voir.
Ainsi
lui avaient-ils expliqué durant tout ce temps, ce temps qui était autant d'années que les doigts d'une seule
main qui salue .Chaque fois qu'ils lui parlaient de cette manière, l'enfant
les regardait et dès que le silence s'installait, il partait rapidement jouer avec des
cailloux et des petits bouts de
bois Il jouait ou construisait?...Dieu seul le sait!...Mais toujours il dressait une nouvelle petite maison.
Il jouait aussi avec l'eau du ruisseau
qui près de là prenait sa course au milieu de beaucoup d'arbres
plantés comme des lances.
Que faisait le petit avec l'eau? Il la
tapotait très doucement sans écraser une seule goutte, sans faire éclater
les bulles de l'écume. Les petits poissons et aussi les grands, s'approchaient pour
écouter ces petits coups qui sous l'eau
courante et limpide, devaient résonner comme une mélodie ou un chant. Il jouait aussi avec les
fleurs, sans les arracher, ni les cueillir.
Peut-être, comme toi, voulait-il les regarder, chargées de leur intense parfum. Que faisait-il avec les
fleurs? Avec délicatesse, il les prenait par leur tige, jusqu'au moment ou leurs
feuilles frémissaient avec grâce dans le vent. Ceci arrivait non seulement au printemps,
mais aussi pendant les autres saisons de l'année.
Et que pensaient les fleurs?
Certainement, elles étaient surprises en entendant que de leurs pétales jaillissaient des
chansons de toutes les couleurs.
Si je te dis qu'il jouait aussi avec
les étoiles, tu ne le croirais pas? Eh ! Bien si, il jouait aussi avec les étoiles Il les
regardait et les observait de jour comme de nuit. De jour, elles étaient
des ombres bleues derrière un voile lumineux. Et de nuit elles formaient la Constellation d'Orion le
groupe des diamants, la flottante croix du sud, la plus éloignée de la lune et du soleil.
Finalement, il les laissait tomber dans
ses yeux, pour les reprendre ensuite comme si c'étaient des pièces de
monnaie de cristal.
Alors il les lançait vers le ciel et
chaque étoile reprenait sa place. Mais en volant, vers le haut ou vers le bas
(le ciel est partout) elles allaient
répandant dans leur sillage, leur voyage, une mélodie de lumière.
L'enfant faisait tout cela sans savoir qu'il cherchait son propre prénom (nom
caché) parmi toutes ces choses. Il jouait même avec les petits animaux des champs et
de la montagne qui chantaient à leur manière et que parfois, ni toi, ni moi, nous ne sommes
capables de bien entendre.
Nos oreilles ne peuvent pas tout percevoir, bien que, je sois sûr que l'enfant, lui, les saisissait comme de
parfaits sons clairs.
Un jour sa mère est revenue comme le
lui avaient promis, ses amis paysans,
désormais plus âgés et encore plus sages. Ils se sont quittés comme si ils
venaient de se rencontrer: C'est ça, la vraie amitié.
Le chemin n’en finissait pas, balayé
par le vent et la poussière. Ce fût à ce
moment, que la mère s'est arrêtée, même si on avait cru qu’elle marchait
toujours. Elle l’a regardé avec amour et pleine de joie. Son discours à été
aussi simple qu’un pétale.
Elle lui a dit:
-Ton prénom
est Jean.
Ainsi, elle a parlé et l'enfant est resté uni à
son prénom pour toujours. Jamais, il ne se séparerait de lui, ce souffle
doux difficile à oublier.
Toi, tu diras que c'est un prénom très répandu, très connu, très courant.
La terre entière est peuplée de Jean! Pourquoi l'enfant de ce conte s'appelle-t-il ainsi? Parce qu'il a fait que les
étoiles, l'eau et les fleurs chantent.
Parce qu'il a su écouter les hommes et comprendre
la langue secrète des animaux Parce
qu'il a découvert qu'une grande chanson parcourrait le monde.
C'est pour cela que son prénom est JEAN et qu’il
ressemble tellement à celui de nous tous.
1977 / CUENTO A
CUENTO, Grupo Editorial EON-Centro
Universitario de Tijuana, 1997. pp. 281-284 / Traduction Espagnol-Français:
Mariluz Suárez Herrera. 2001.
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